Gaspard Baradel

Publié le 2 mai 2018

Interviews

Vu récemment en concert sur Clermont-Ferrand avec son Quartet, la bande du Free Burning Jazz ou encore Alma Loca, le saxophoniste Gaspard Baradel nous en dit plus sur son parcours, sa musique et ses différents projets.

Voltbass

Pour commencer, peux-tu te présenter et nous parler un peu de ton parcours ?

Gaspard

J’ai commencé le saxophone à l’âge de 7 ans dans une petite école de musique à côté de Grenoble. Je suis arrivé à mes 11 ans à Clermont où j’ai fait le conservatoire en classique, j’ai fini à 18 ans, et je suis parti à l’Ecole Nationale de Musique de Villeurbanne où j’ai passé trois ans. C’est là que j’ai rencontré Antoine Bacherot et Josselin Hazard par exemple. J’ai passé mon DEM de jazz là-bas en 2015 et depuis je suis revenu à Clermont parce que j’ai l’essentiel de mes projets ici, et que j’aime plus la vie à Clermont qu’à Lyon. J’ai enseigné aussi, pendant 5 ans, dans diverses écoles de musique autour de Clermont et à Lyon. J’ai arrêté l’année dernière.

J’ai plusieurs expériences de groupes de musique, mon tout premier groupe c’était au lycée, un groupe de jazz, qui s’appelait Lover Jazz… un groupe de reprises avec des copains. Mon premier groupe professionnel ça s’appelait Karma Orchestra, avec Thibault Cohade, c’est mon premier groupe qui m’a vraiment lancé sur scène. Après il y a eu Aquafunk, c’est un peu le groupe qui m’a permis d’apprendre à jouer sur des plus grosses scènes, au Tremplin, à la Coopé, sur la place de Jaude… ça fait près de deux ans que le groupe n’existe plus, mais sinon la plupart du temps c’est des groupes de jazz, Karma Orchestra c’était plus un groupe de musique orchestrale comme son nom l’indique. J’ai aussi Totrio, groupe de jazz manouche monté par Milan Ollier. Il y aussi le Blackstone Orchestra, un big band où on est 17. Et puis j’ai mon groupe et également deux groupes sur Lyon, un groupe de rock progressif, Celsius, le seul groupe où j’ai une pédale d’effets, des micros, un Moog, le piano… c’est mon groupe le plus électrique. Et à Lyon j’ai donc aussi un groupe de jazz, le Paul Lamarca Quartet, là c’est sur les compos du pianiste. Je joue dans Alma Loca aussi depuis septembre, grâce à Josselin qui avait rejoint le groupe avant, et à Juliette, la chanteuse, qui voulait mettre des cuivres, en ce moment c’est le groupe le plus actif. Donc je suis content parce que c’est assez varié !

Voltbass

Et de temps en temps tu fais des soirées impro au Fotomat’ avec Josselin Hazard et Antoine Bacherot…

Gaspard

Oui au départ c’était Josselin et Yannick Chambre, aux tous débuts du Fotomat’, donc Josselin m’en avait parlé et on a commencé à le faire à trois avec Yannick, qui s’est ensuite éloigné de ces soirées donc c’est Antoine qui a pris le relais, et puis Théophane est arrivé avec les vinyles et ça s’est pérennisé là-dessus. Puis avec de temps en temps les textes avec Jean-Luc Guitton et Florent Rousset Farinelli. C’est vraiment une chance d’avoir un lieu comme ça pour faire de l’impro libre.

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Et vous avez donc la prochaine soirée au Fotomat’ le 4 mai, est-ce que tu as d’autres dates en prévision ?

Gaspard

J’ai surtout pas mal de dates avec Alma Loca en juillet-août, une date avec le Blackstone en août, et j’ai des dates avec Celsius en mai à Lyon, une au Toï Toï et une à l’Opéra. Et les autres dates du Free Burning Jazz, il y aura le 25 mai pour la soirée Potlatch 68 et ensuite le 16 juin.

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Tu disais que tu as commencé par le classique et tu es passé au jazz ensuite, c’est parce que tu t’y sens mieux, ou que certains artistes t’ont poussé vers le jazz ?

Gaspard

J’ai une mauvaise expérience de l’école classique, beaucoup de pression, bosser pour être toujours le meilleur, ça me correspondait pas du tout et ça m’a coincé pendant longtemps. Et du coup quand j’ai fini le conservatoire à 18 ans, j’avais des copains qui avaient fait ou étaient à l’ENM à ce moment-là et qui m’en parlaient, donc j’ai tenté et j’ai été pris. Et ça m’a fait beaucoup de bien, déjà de sortir de Clermont, d’aller dans une plus grosse ville, et le jazz ça m’a vraiment débloqué plein de choses, ça m’a enlevé des œillères que le classique m’avait bien accrochées. Pour moi en classique il faut bosser pour tendre à un seul truc, le son classique, et en jazz c’est beaucoup plus de la recherche introspective, être le plus soi-même, creuser à l’intérieur de soi plutôt que se mettre dans le moule, et ça c’est sans fin parce que toute ta vie tu pourras toujours creuser plus loin, et c’est stimulant, ça me plait beaucoup plus. Et l’accès au jazz ça m’a appris à improviser, à être créatif et actif dans la musique.

Voltbass

Et le saxophone, c’est venu comme ça ?

Gaspard

Mon papa n’est pas musicien professionnel mais il a fait pas mal de musique, et il a vite vu que quand j’avais 5-6 ans j’arrêtais pas de chanter et de taper partout, donc il m’a inscrit au solfège et à la musique un peu de force. Et le choix de l’instrument ça rejoint un peu le jazz, j’ai beaucoup hésité entre la trompette et le saxophone parce que quand j’étais petit pour moi ça représentait le jazz, et le jazz représentait la liberté dans la musique. Et après j’ai choisi le saxophone plutôt que la trompette parce que je trouvais ça plus joli !

Voltbass

Et donc dans tes différents groupes il y a ton Quartet pour lequel tu composes, est-ce qu’il y en a d’autres ?

Gaspard

Dans Alma Loca un petit peu, il y a moi au saxophone soprano et Julien au trombone et du coup tous les deux on arrange les parties pour qu’elles aillent avec les chansons de Juliette, et des fois ça m’arrive de composer aussi des parties vraiment dans ses morceaux, elle me laisse de la liberté là-dedans donc je compose un peu là aussi. Et j’ai fait une compo pour le Blackstone également. Sinon je suis plus improvisateur.

Voltbass

Tu continues de composer en ce moment ?

Gaspard

Oui j’essaye d’avoir la rigueur de faire une composition par semaine. Plus tu en fais plus c’est facile d’en faire comme pour tout, il y a un truc un peu mystique dans la compo mais c’est un travail comme un autre, juste qui te renvoie à toi-même donc ça c’est pas forcément facile pour tout le monde, ça demande des efforts. Donc je m’oblige à en faire une par semaine et celles qui me plaisent le plus je les garde pour mon groupe.

Voltbass

Et vous les retravaillez après en groupe ?

Gaspard

C’est ça, j’apporte l’idée principale avec le thème et puis j’enregistre les répétitions, je laisse un peu faire, c’est mes compos mais dans le groupe il y a pas que moi, et en fait la compo se façonne toute seule avec les musiciens qui l’interprètent à leur façon, si c’était pas Josselin à la batterie la compo sonnerait différemment etc. Et d’ailleurs au départ c’était Yannick Chambre avant Antoine, et le groupe sonnait différemment. Du coup je me suis rendu compte que juste pour une personne, la compo change de lumière.

Voltbass

Et tu as une assez grosse expérience en enseignement du coup, tu voulais te consacrer plus au travail de musicien ?

Gaspard

Là je donne encore un cours particulier mais c’est tout. Ça m’a vraiment apporté d’enseigner mais ça prend beaucoup de temps et de l’investissement, et ça m’a vraiment intéressé mais plus le temps passe et plus tu as de groupes et tu te retrouves à faire un peu deux jobs à plein temps, et j’ai moins eu envie d’investir du temps dans l’enseignement. Ça ne veut pas dire que j’en referai pas mais là ce serait le faire « à la chaîne », un élève après l’autre, donc c’est pour ça que j’ai arrêté, pour me consacrer plus à la musique.

Voltbass

Pour se faire une idée, qu’est-ce que tu écoutes en plus de jouer, plutôt du jazz ou un peu de tout ?

Gaspard

J’écoute pas mal de jazz, j’ai ma période free jazz en ce moment, j’écoute pas mal Coltrane, les disques de la fin de sa vie, Expression, Meditations… Sinon je suis un grand fan des Doors, Pink Floyd, Led Zeppelin, Dire Straits, Queen… J’aime beaucoup aussi la chanson française, j’adore la musique de Brel. Et j’écoute du jazz actuel, Christian Scott, Joshua Redman, saxophoniste dont je suis vraiment fan. Albert Ayler aussi, grand saxophoniste de free jazz… Mais ça dépend des périodes, donc en ce moment c’est free jazz, et d’ailleurs ça m’aide aussi pour la composition, le free jazz c’est tellement aux limites, c’est un peu ce qu’on fait au Fotomat’, c’est de l’impro, et du coup c’est ce que j’essaye de faire quand je compose, j’improvise complètement tout seul, j’enregistre, et après le lendemain j’écoute ce qui m’a plu et je prends les meilleures idées et j’essaye de les mettre sur partition. Donc quand j’écoute du free jazz ça me motive à jouer de cette façon-là et ça me fait vraiment grandir musicalement, ça m’enrichit énormément. J’écoute un peu de rap, pas beaucoup, mais j’aime beaucoup Soweto Kinch, saxophoniste et improvisateur, et aussi Soklak, un rappeur français qui a pas mal tourné pendant les années 2000.

Voltbass

Pour finir, qu’est-ce que tu dirais pour encourager les gens à venir vous voir en concert …?

Gaspard

Si je fais de la musique c’est surtout pour pouvoir échanger avec les musiciens et aussi avec le public, ce que le Fotomat’ nous permet de faire avec les impros libres, c’est vraiment génial de pouvoir faire ça, le cadre est tellement grand qu’on peut vraiment être dans l’instant présent, ça nous permet de pouvoir échanger avec les musiciens et avec les gens qui sont là et c’est ce que j’essaye toujours de faire, chaque fois que je joue, j’essaye d’agripper les gens pour qu’ils se connectent à nous dans la même dynamique et au même moment, et qu’on essaye d’échanger un maximum d’énergie, qu’on arrive vraiment à partager un moment ensemble.

Crédit photo : Yann Cabello

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