Sébastien Polloni
Finalement, il aura fallu que le temps coule derrière la ligne de front, où l’on monte à l’assaut sans trop savoir, sans comprendre. Il aura fallu s’échiner, batailler, rechigner, pour voir le verbe tout au fond, et l’homme tout cru. En renonçant au tout électrique, et en retrouvant son nom, Sébastien Polloni a franchi les barbelés qui l’éloignaient du salut, une position fièrement campée quelque part là-bas, entre Manset, Cantat ou Bashung, des visages et des figures entrevus sous ce beau tapis de guitares sèches.
Enfin seul donc, mais Dieu merci, fort bien entouré. Une fois encore, là où la plupart échouent à habiller les lettres du cœur, Guillaume Cantillon a patiemment tissé l’habit de lin qui humblement recouvre les mots de Sébastien Polloni, en réalisant Ravines, futur album futé et mûrement réfléchi.
Des caisses et des cordes, du beau bois, une ou deux percussions plutôt sexy, voilà du beau travail, de l’artisanat d’exception, que Les Imprudences, l’Autre Label ont accueilli pour Noël. La maison d’art de Bertrand Betsch et Kiefer, toute entière bâtie autour de l’artiste, et seulement l’artiste, ne pouvait rêver meilleur locataire, auteur juste à sa place et d’une touchante sincérité.
Cette allure singulière, ce très léger désenchantement, ces petites choses heureuses et fugaces, se chantent ici avec la passion et les mots doux que l’on devine chez les gens qui s’aiment vraiment. A l’image d’un Julien Estival, ami poète attendu pour un élégant et malicieux duo, Sébastien Polloni raconte la vie comme elle vient, avec ses creux et ses bosses, ses ravines humides et ses champs de blé ondoyant sous les vents d’été.
De bien belles chansons, tout simplement.