Zëro
L’histoire se poursuit mais ne se répète pas. Tracté par l’envie et le plaisir, Zëro continue de s’offrir la liberté d’arpenter de nouveaux territoires, de prendre de nouveaux risques, de pousser sa musique dans des recoins encore inexplorés chez lui. Sans jamais s’y perdre. Ainsi, cinq ans après l’excellent ‘Hungry Dogs (In The Backyard)‘, et deux après le court mais indispensable ‘Places Where We Go In Dreams‘, le (désormais) trio lyonnais ajoute un cinquième album à sa discographie. Et non des moindres.
Rouge comme le fer qui marque indéfiniment, ‘San Francisco’ trace les dernières pérégrinations musicales du groupe. Moins immédiate que ses prédécesseurs qui avait fait de leurs compositions directes leur particularité, cette nouvelle salve voit Zëro aborder plus généreusement la pop et les ambiances cinématographiques chères à la Bay Area : une ligne directrice qui ne se fait sentir que par bribes sur l’entame ‘Last Bills For Lapdance’ partagée entre la tension du post rock et la nervosité du noise rock, mais qui prend peu à peu ses aises pour finalement laisser jaillir des mélodies lumineuses (‘Cheap Dream Generator’), une atmosphère légère inhabituelle chez les lyonnais (‘Ich… Ein Groupie’, les contours jazz du titre éponyme), et dessiner des décors inédits chez eux (‘Lac Baïkal’, ‘Jed/Snowdog’).
Pourtant, ‘San Francisco’ ne dépayse pas celui qui se nourrit depuis tant d’années de la tension et de l’obscurité émises par le groupe. Eléments indispensables, fil rouge d’une discographie distinguée et racée, elles sont encore là, contenues ou libérées, mais toujours immuables pour laisser les trois musiciens broder leurs velléités à partir d’elles, papillonner au gré d’envies nouvelles. En attestent ‘The Drum Thing’, ‘Boogie Tango Thrill’, et ‘Cracking’, tous magnifiques d’intensité et de puissance en plein coeur d’un ‘San Francisco’ rappelant aussi, ici ou là, l’héritage de Chicago chez ces Zëro dont on a toujours plus envie de virer la première lettre.