La rencontre d’Antoine et James ça va faire bientôt trois ans. Au départ Antoine a rencontré James sur un jam au Festival de Marciac, où Ahmad Jamal joue cette année-là. James sort du concert d’Ahmad Jamal, tout le monde va se coucher mais lui va se balader dans le village pour voir s’il y a un bœuf quelque part, et là il trouve Antoine, qui est un fan d’Ahmad Jamal. Donc Antoine va le voir pour parler musique et le contact passe tout de suite, James est très sympa et abordable, ils font le bœuf ensemble et gardent contact. Et un jour Antoine monte à New York en vacances, il l’appelle et ils se boivent un café à New York. Et ils se disent que ça serait cool d’organiser quelque chose en France. Et donc l’été 2015 Antoine invite James à Lyon, ils jouent au Péristyle à l’Opera de Lyon trois jours de suite.
Avec Antoine on se connaissait de Lyon, de l’ENM, où j’accompagnais les nouvelles promos dans leurs examens. Et quand il a invité James, il a eu l’idée de faire un truc tous les trois, sur une petite série de concerts. James connaissait un batteur anglais qui s’appelle Andy Barron, et donc Antoine a proposé de faire une partie des concerts avec Andy et une autre avec moi, et c’est comme ça que ça s’est passé. C’était une bonne expérience, on n’attendait rien spécifiquement, pas d’objectif de disque ou de tournée…
Après cette série de concerts on est allés faire une séance d’enregistrement ; on a fait des prises en vrac, joué des standards, on a passé une journée dans un studio à Roanne et à la fin de la journée on a pris les tracks mais on les a jamais sortis, c’était pour les garder en souvenir. James est rentré à New York, il a ré écouté les pistes avec sa femme, et je dirais que c’est là que l’histoire du trio a commencé. Il nous a recontacté avec Antoine un mois et demi plus tard, il nous dit qu’il a ré écouté ce qu’on a enregistré et que c’est super. Et l’année d’après c’est lui qui nous a invités à New York, pour aller jouer dans des clubs, donc on a fait quelques concerts là-bas. C’était une super expérience, moi ça faisait déjà deux ans que je partais à New York en freelance avec mon sac à dos, sans connaitre personne, en allant prendre un cours à droite à gauche, j’allais chez Ari Hoenig, je jouais dans les caves… et là cette fois on allait avec Antoine à New York pour quelque chose d’organisé par James, un concert officiel, où on était attendus avec le public de New York donc il y avait une pression particulière à aller jouer dans ce contexte, mais une pression plutôt positive. Donc ce trio il a commencé vraiment à naitre humainement et musicalement. Et comme James avait envie qu’on continue quelque chose ensemble pour les années à venir, on s’est dit qu’on allait refaire une session d’enregistrement six mois après. Quand lui était en train de nous programmer des choses à New York, nous on lui programmait des dates en France derrière, mais tout ça sans avoir de disque, sans support audio. Et donc là on se dit que ça fait un an qu’on bosse ensemble, qu’on va ré enregistrer un truc.
On retourne dans le même studio, Les Tontons Flingueurs, chez Pascal Coquard, et on dit qu’on va refaire des prises et que ça ne peut être que mieux. On fait deux jours de prises avec des morceaux d’Antoine, qu’il avait écrits pour le trio, quelques standards revisités, on enregistre huit morceaux et on en garde sept qui nous plaisent vraiment, et là on a un premier disque, en 2016. On a tout fait en autoproduction. Pascal qui tient donc le studio nous a fait les prises de son, le mix, le master. Et Julien Pianetti qui est graphiste à Clermont-Ferrand, nous a fait le design. Il est aussi batteur de jazz de formation, n’en a pas fait son métier mais est passionné de jazz et joue toujours à l’occasion. Donc le lien était évident, il connait très bien cette musique et le disque lui a tout de suite parlé.
La réalisation du disque a pris un peu de temps, et on n’était pas pressés de le sortir, on avait plusieurs versions de chaque morceaux donc on a écouté et ré écouté pendant quelques mois. Et ces versions-là on a choisi de les mixer, parce que cette fois ça racontait vraiment notre rencontre, notre histoire à trois. Avec James qui nous avait invités à New York il y avait une vraie réciprocité, et notre première session d’enregistrement ne racontait pas forcément ça, même si c’était incroyable pour nous à ce moment-là. Et dans six mois on aura encore des nouvelles compos, donc le concert qu’on va faire ça sera le disque, mais peut-être aussi des nouveaux morceaux… c’est en évolution permanente.
Le nom de l’album, The Pursuit, vient de James qui dans le studio, au milieu de la session d’enregistrement, s’est mis à philosopher sur ce qui était en train de se passer, et au bout de dix minutes il en ressortait ça. Il restait une des compos d’Antoine qui n’avait pas de nom, il avait écrit une mélodie et un thème mais pas encore mis de nom dessus, et ça correspondait parfaitement, donc en fait il nous a trouvé le nom de la compo et du disque ! L’idée c’est que dans la musique tout continue, tout avance toujours, rien n’est figé, c’est la poursuite des choses. Pour lui ça avait du sens, même après 35 ans de tournée avec Jamal partout dans le monde, c’est jamais fini, et avec nous il se sentait dans cet esprit-là, l’idée que tous les trois on va encore faire des choses.