Un premier LP brûlant et fougueux pour le duo Telegraph

Publié le 23 novembre 2017

Dès le premier titre de Love Is The Key, « Because Men », les deux musiciens de Telegraph lâchent les chevaux et annoncent la couleur : pas de calcul, de l’énergie à revendre et une musique aussi intense que jubilatoire. Bien sûr, ce disque a les défauts de sa jeunesse et de ses moyens, mais qui lui donnent un charme, une fraîcheur finalement peu commune dans l’exercice d’un premier long format autoproduit.


Pour faire simple, Telegraph, c’est elle plus lui, sans rapport de force et véritable prise de pouvoir, une alchimie comme on aimerait en entendre plus souvent dans la scène émergente. Assurément vous serez emporté en premier lieu, comme moi, par la personnalité et les intentions de la voix d’Amélie. Certainement inspirée vocalement par de grandes chanteuses, comme Janis Joplin ou Beth Ditto qui se sont affirmés en tant que femmes, capables de tenir la scène comme le micro, dans un rock pourtant pour le moins prisonnier de son machisme et d’une virilité souvent limitée artistiquement. Comme ces grandes dames, Amélie ne cherche pas sa voie, dans le jeu de la séduction facile, prouvant à maintes reprises par l’intensité de son interprétation que sa quête artistique n’est pas là. Il faut oser, sans tomber dans le pathos et avec une naïveté touchante, qui ne trahit sans façon, une sincérité évidente, énumérer tous ces pays, que nos sociétés occidentales ne veulent voir que sur la mappemonde, sur la conclusion de « Roses ». Ainsi je pourrais imaginer sans problème, que des musiciennes aussi émancipées et créatives, pour ne pas dire militantes commes Pj harvey, Patti Smith ou encore Bjork, fassent partie de l’univers de notre jeune artiste.

Puis lentement, à travers des phénomènes d’attractions et de magnétismes étonnants, vous serez aspiré, dans cette musique rock polymorphe et resserrée, où Ben tiendrait le rôle de metteur en scène, d’architecte sonore, capable aussi bien de maîtriser cette matière musicale complice et mouvante que de l’emporter avec virtuosité dans un tourbillon électrique (comme sur les solos de guitare de « Pissing a river », « Because men »).

L’éclectisme, qui résonne dans la musique de nos deux musiciens ne suffit concrètement pas à expliquer la générosité climatique de ces huit morceaux. Capables de convoquer dans un même espace, le lyrisme des années 80s, comme les élans héroïques du hard-rock (« My world »), la sensualité du R’n’B moderne avec la simplicité du folk («Factory »), ils démontrent une envie débordante d’inventer et de créer. Le tout porté, semble t-il, par une curiosité évidente pour la musique qu’elle soit blues, soul, funk, métal, rock ou trip-hop et j’en oublie certainement. Et même lorsque la proposition est plus classique, le groupe trouve les ressorts pour donner ce supplément d’âme, et sortir du simple exercice de style (« My Mind »).

Bien sûr, cet album part dans pleins de directions (trop ?), et j’aimerais par moments voir certaines pistes se développer plus que d’autres (« Bussiness »). Je peux d’ailleurs saluer le travail plein de finesse et de savoir-faire du studio Polyphone Records et de Théophane Bertuit, qui a su donner corps à ce premier jet réussi. Car même si Love Is The key est parfois excessif dans sa générosité intrinsèque, il reste terriblement prometteur. En même temps, en toute honnêteté, comment une entité qui s’est structurée réellement il y a moins de deux ans, pourrait rivaliser avec les moyens ( faut-il le rappeler auto produits), qui restent les siens, avec des groupes ayant mis des années à trouver véritablement leurs chemins. Ce premier album est de toute évidence, une porte ouverte sur l’avenir et le début (ou la continuité, c’est selon) d’une belle histoire, dont il reste à écrire les plus belles pages, comme ont dû un jour commencer à les écrire, The Do ou Pethrol.

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Retrouvez bientôt Telegraph en concert, au Fotomat. et l’album Love is the Key, prochainement sur toutes les plateformes de Streaming.

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